Ici
et là-bas, quand un objectif d'appareil photo se pose, tel
un regard insistant, sur celui qui s'y prête, il y a toujours
cet étrange temps suspendu, où sont échangés
des messages muets. Le " regard à la mer", avec l'espérance
très forte que quelqu'un ailleurs, on ne sait où, on
ne sait qui, recevra par les hasards d'un souffle imaginaire, cette
image rémanente de soi.
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Il
y a de la fierté, de l'inquiétude, de la tendresse,
de l'espoir, et même de la violence, dans ces regards qui s'accrochent
à l'inconnu. Partout dans le monde, et surtout en Afrique où
la photographie est encore une rareté ,il y a dans la pose
devant l'objectif une volonté inexplicable de dépasser
ses limites temporelles et spatiales, une nécessité
d'immortaliser sa trace, un espoir de réponse à ce que
l'on a décidé de donner de soi en cet instant aussi
bref qu'un coup de feu.
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Ici,
en Afrique, il ne fait pas bon être un poulet. D'ailleurs, dès
les premiers jours notre vie est difficile. Il faut trouver à
manger par ses propres moyens et comme on est beaucoup dans ce cas,
on est rarement rassasiés. Et puis, quand après ces
temps difficiles on s'en tire et que l'on est presque adulte, on a
peu de chance d'échapper aux massacres que les hommes infligent
à notre race, pour des raisons de sacrifices en l'honneur des
Dieux. Sans parler des transports en commun !
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Là-bas,
la vie de coq est beaucoup plus intéressante. Même si
elle finit souvent dans une casserole, ce qui est moins glorieux que
de mourir pour les Dieux, au moins est-ce accompagné d'un bon
vin. Et puis avant, on a eu le temps d'être le roi de la basse-cour.
Cela nous donne des droits bien sûr, mais surtout beaucoup de
devoirs. Il ne faut pas croire que la place de chef est de tout repos.
En tout cas, nous sommes fiers d'être l'emblème National.
Non pas en temps de guerre, mais sur les stades, quand notre pays
met son honneur en jeu, en bleu, blanc et rouge...
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